Comme pour beaucoup d’entre nous, les romans érotiques et quelques films, parfois pornographiques, ont fondé ma perception du monde BDSM. Pourtant, la sagesse et l’expérience qui accompagnent la maturité due à mes nombreux anniversaires m’alertent et me disent que les représentations populaires de cette expérience sont très probablement erronées, tronquées ou corrompues par la négation sociale de ce phantasme. A l’instar du malaise qu’il y a à évoquer des actes intimes en public (je défie chacun/e d’arriver un matin au boulot et de déclarer qu’il/Elle a bien joui se matin en se masturbant sous la douche), comment aurais-je pu en savoir plus sur la réalité d’une vraie expérience BDSM. Faisant fi des idées préconçues et avec une forte appréhension de découvrir des pratiques auxquelles je pourrais être soumis, j’ai recherché une domina à laquelle me confier. Il fallait éviter les pseudo-dominas, se méfier des profils de type escorte pratiquant le BDSM ; quelle blague ! En découvrant le site de « Madame Désirée », je me suis dit que c’était classe, ça avait l’air gentil et confortable. Nous avons échangé quelques messages pour fixer les modalités de notre première rencontre. J’avais déjà compris par cet échange épistolaire que l’expérience ne serait pas ce que je pensais. Désormais et pour longtemps, en m’adressant à Elle, il n’y aura plus qu’un Madame exprimé avec déférence. Et moi je serai tutoyé comme un morveux.

 

Je fus surpris par le soin que Madame a apporté à la préparation de notre première rencontre. Beaucoup de questions et beaucoup de demandes de clarifications m’ont d’abord inquiété. Je craignais, et je crains toujours, que Madame ne s’immisce dans mon esprit, n’exploite mes craintes et ne me possède au-delà de la soumission physique. Je suis maintenant quelques séances plus tard et je continue à apprécier son professionnalisme. Si Madame usait son talent à mauvais escient, Elle pourrait vous briser mentalement.

 

Madame est une femme attirante. Ses atouts ne peuvent laisser indifférent. Elle sait très bien comment se mettre en scène. Elle captive votre regard. Mais gardez-vous bien de la désirer car Elle restera inaccessible. Je crois que je m’en sors bien dans cet exercice d’attirance sans désir. Même si parfois, vos sens et votre assurance seront mis à rude épreuve. Madame vous fera subir des outrages physiques. Vous ressentirez la douleur de plusieurs manières différentes. L’humiliation et la dégradation atteindront rapidement un niveau inconfortable. Ne croyez pas que vous êtes assez fort pour vous y soustraire. Vous chercherez à lui plaire, à ne pas la contrarier, à vous montrer docile mais ça ne sera jamais suffisant. Lorsque les protestations de votre corps cesseront de l’amuser, Elle cherchera à entrer dans votre tête. Pour ma part, je dois avouer que c’est efficace. Je ressens le danger à ce moment-là, plus fort que les coups, plus choquant que les humiliations. Mon esprit est exposé, mis à nu et je me sens réduit à l’état de rien. Madame joue, Madame sonde, Madame décide, Madame domine.

 

J’ai revu Madame quelques fois déjà. Je sais que je la verrai encore souvent. Le plaisir de m’abandonner à ses caprices est un moteur. Mais ce n’est pas tout. Après chaque séance il me faut plusieurs jours pour qu’Elle cesse de briller et de danser dans ma tête. C’est très perturbant les premières fois. En outre, j’ai le sentiment de parcourir une vraie expérience de vie. Je me sens paradoxalement plus sûr de moi dans ma vie quotidienne. La soumission à laquelle je me contrains en sa présence agit comme un repoussoir sur les frustrations de la vie quotidienne. Comme un saut en parachute ou attaché à un élastique, cette expérience augmente la confiance en soi.

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